Kwele, peuple du nord-ouest du Congo-Brazzaville et de l’est du Gabon.
Les Kwele se sont établis dans cette région de la forêt humide peu avant l’arrivée des Européens (à la fin du XIXe siècle) et pratiquent depuis lors une agriculture forestière de subsistance avec un peu de chasse, de cueillette et de pêche. Venus de l’ouest, ils ont été poussés par les Fang, qui, équipés d’armes à feu, ont entrepris depuis le XVIIIe siècle une lente migration vers le sud. Leur mode de vie a changé avec l’évolution de la société et l’exploitation de la forêt qui a ouvert leur région sur le reste du pays.
Habitant de gros villages forestiers composés d’une douzaine de lignages, les Kwele ne reconnaissent d’autre autorité traditionnelle que le chef du lignage qui a su s’imposer. C’est pourquoi la rivalité est permanente entre les différents lignages dont chacun possède un chef de guerre (gen). Les conflits, qui ne manquent pas de surgir, sont aplanis par un « pacificateur » qui joue le rôle d’arbitre et, à l’issue d’une action collective, par une chasse à l’antilope en forêt qui vise à détourner l’agressivité des guerriers prêts à en venir aux mains. Cette chasse est le premier acte d’un rituel de réconciliation, le culte du beete, à l’issue duquel un masque (ekuk), représentant une antilope (le génie tutélaire), apparaît à l’orée du village — qui n’est plus habité que par les femmes, les enfants et les vieillards. L’ekuk les invite à danser et les réjouissances poussent les guerriers partis en forêt à réapparaître, à se mêler à la population, et à faire la fête avec elle. Les tensions, qui restent toutefois très vives, sont symbolisées par le masque gon. Celui-ci représente une face de gorille et cristallise la nature néfaste et désordonnée qui cause des déprédations dans les cultures et qui, cette fois, s’attaque à la population et s’introduit dans le village en y semant la panique. Fait très rare, alors que les porteurs de masque ne doivent pas être reconnus, et sont toujours vêtus d’un long vêtement en fibres végétales figurant la brousse, où habite le génie tutélaire figuré par le masque, le porteur du gon, en revanche, est nu, afin de mieux montrer sa nature antisociale.
Les Kwele produisent aussi des masques polychromes où prédomine le blanc, superbement proportionnés, sans bouche, mais dotés de grandes orbites prenant toute la largeur du visage avec des yeux fendus. Ils sont utilisés dans les rituels liés à la direction politique dans les villages.